Protéger par brevet un médicament combinant deux principes actifs connus : est-ce possible ?

De plus en plus de traitements thérapeutiques reposent sur la combinaison de deux principes actifs distincts (ou plus). Il est possible d’obtenir une protection par brevet en Europe pour une telle combinaison sous certaines conditions...

Grenoble, le 30 décembre 2021 – De plus en plus de traitements thérapeutiques reposent sur la combinaison de deux principes actifs distincts (ou plus). Il est possible d’obtenir une protection par brevet en Europe pour une telle combinaison sous certaines conditions, y compris dans le cas où chacun des principes actifs de la combinaison est déjà connu comme étant impliqué dans un mécanisme lié à la maladie visée. On parle alors d’invention de combinaison.

L’Office Européen des Brevets (OEB) distingue le simple assemblage de caractéristiques de l’invention (juxtaposition) de la combinaison. Pour qu’il y ait invention de combinaison, les caractéristiques (ici les principes actifs) doivent être reliées entre elles par une interaction fonctionnelle. Cela signifie que les principes actifs de la combinaison doivent s’influencer mutuellement pour produire un effet technique combiné qui est différent de celui qu’ils produisent individuellement.

Cet effet technique combiné peut prendre plusieurs formes. Le cas le plus favorable se présente lorsque la combinaison de principes actifs produit un effet de synergie. L’OEB considère que deux caractéristiques interagissent en synergie l’une avec l’autre si leurs fonctions sont liées et que celles-ci conduisent à un effet supplémentaire allant au-delà de la somme des effets produits par chacune de ces caractéristiques considérées isolément (voir par exemple la décision de la Chambre de Recours de l’OEB T 1054/05). Dans le cas d’une combinaison de principes actifs, il peut être suffisant de démontrer que l’effet de la combinaison est supérieur à celui obtenu avec chacun des principes actifs utilisés seuls, ou encore à l’effet qu’un spécialiste du domaine aurait pu prévoir d’obtenir en les combinant.

Cet effet technique combiné peut également reposer sur des aspects plus indirects, tels que la réduction d’effets secondaires néfastes, l’optimisation de la pharmacocinétique ou de la biodisponibilité d’au moins un des principes actifs, la possibilité d’administrer le médicament par une voie différente, l’amélioration de l’observance du traitement par le patient, la réduction de la fréquence des doses, etc.

Quel qu’il soit, il est en général préférable d’intégrer au texte de la demande de brevet qui sera déposé, des données expérimentales rendant cet avantage technique crédible.

Pour satisfaire au critère d’activité inventive, cet effet technique (qu’il s’agisse d’une synergie ou de tout autre avantage) ne doit pas être suggéré par l’art antérieur.

Si ces différentes conditions peuvent être remplies, il peut être possible, selon les cas, d’obtenir une protection pour la combinaison en tant que telle (revendication de produit), indépendamment de toute utilisation médicale. Une protection via une utilisation médicale particulière peut également être envisagée (revendication de seconde utilisation thérapeutique), y compris une protection de type « kit-of-parts » (si l’effet technique combiné peut être obtenu même en administrant les différents principes actifs de la combinaison de manière séparée et/ou séquentielle ; voir par exemple la décision T 9/81).

Il convient d’évaluer la satisfaction de ces différents critères pour chaque combinaison que vous envisagez de protéger, avant de déposer une demande de brevet. Les équipes de Regimbeau se tiennent à votre disposition pour vous conseiller au cas par cas à ce sujet.

Publié par

Aurélia Vavasseur, Ph.D

Conseil en Propriété Industrielle
Mandataire en Brevets Européens