Femmes et sciences : Rencontre avec une ingénieure brevets de Regimbeau 

Chaque année, le 11 février, nous célébrons la Journée internationale des femmes et des filles de science, une initiative des Nations Unies visant à mettre en lumière le rôle essentiel des femmes dans l’innovation scientifique. Depuis 2015, cette journée rappelle l'importance de promouvoir l'accès des femmes et des filles aux carrières scientifiques et techniques, encore marquées par des disparités de genre.

Chez Regimbeau, nous croyons fermement que la diversité est un moteur de créativité et de progrès, notamment dans le domaine de la propriété intellectuelle, où l’innovation joue un rôle clé. À cette occasion, nous avons souhaité donner la parole à l’une de nos collaboratrices, ingénieure brevets, qui incarne l’engagement et la passion pour les sciences. 

À travers cette interview, découvrez son parcours, ses inspirations et son regard sur les défis et opportunités pour les femmes dans les sciences. Une belle manière de célébrer leur contribution essentielle au progrès technologique et sociétal. 

Jeanne Redaud, ingénieure brevets spécialisée en numérique, physique et sciences de l’ingénieur 

Après un parcours académique brillant, incluant un doctorat en automatique à CentraleSupélec et des expériences de recherche à l’international, Jeanne a découvert la propriété industrielle en 2018. Forte d’expériences variées en R&D dans des secteurs tels que l’aéronautique, les systèmes biomédicaux et l’électroménager, elle a rejoint Regimbeau en 2024. Jeanne a développé une expertise spécifique dans les systèmes de commande, mettant son savoir-faire au service de l’innovation technologique et de la protection des inventions.  

Pouvez-vous nous parler de votre parcours scientifique et des étapes qui vous ont menée à votre rôle actuel chez Regimbeau ? 

Avec grand plaisir !  

Ayant toujours eu d’excellents résultats scolaires, je me suis naturellement tournée vers la filière scientifique au lycée. Les classes préparatoires scientifiques m’apparaissaient alors comme un défi à relever. Après deux années éprouvantes mais enrichissantes, j’ai choisi d’intégrer l’Ecole des Mines de Paris en 2016. Elevée en province, j’étais curieuse de découvrir la richesse culturelle offerte par la vie dans le quartier latin, et tout autant attirée par le haut niveau académique des Mines que par la transversalité des enseignements proposés.  

C’est au cours de ma scolarité aux Mines que j’ai découvert Regimbeau, à l’occasion d’un petit-déjeuner table-ronde organisé dans le cadre d’un forum étudiants-entreprises. J’ai été séduite par la vivacité d’esprit et la bienveillance des collaborateurs présents, et pu rapidement convenir d’un stage de césure au cabinet, à la fin de ma deuxième année. J’ai pu ainsi découvrir en immersion le métier d’ingénieur brevets, en étant d’abord formée à l’agence principale de Paris, puis à Munich. Ce fut un vrai coup de cœur, et j’ai su rapidement que j’avais trouvé ma voie.  

Ayant commencé à apprendre le japonais et attirée par les transitions en cours dans le secteur automobile, j’ai choisi de poursuivre ma césure avec un stage en R&D à Valeo au Japon. Après ma première expérience en cabinet, j’étais curieuse de découvrir le secteur de la R&D dans un grand groupe. Je me suis retrouvée rapidement avec de grandes responsabilités sur le projet et ai aussi beaucoup apprécié cette expérience.  

De retour en France pour la fin de mon cursus, je rêvais alors de repartir au Japon pour quelques années. A l’époque, j’avais envie de poursuivre mon expérience internationale et de gagner en maturité avant de revenir en France pour démarrer ma carrière en propriété industrielle, sachant que de nouvelles années d’études m’attendraient alors.  

La crise sanitaire a chamboulé mes plans. J’ai toutefois trouvé un stage de fin d’études passionnant, toujours en R&D, mais cette fois dans une PME française. J’ai eu ensuite l’opportunité de faire une thèse en mathématiques appliquées à Centrale Supélec, sous la direction d’un de mes anciens professeurs. J’ai considéré, à juste titre, que cela me permettrait de gagner en compétences techniques et humaines, et de travailler dans un contexte international. Après deux séjours de recherche au Canada puis au Mexique, j’ai même décroché une bourse du gouvernement japonais pour y retourner quelques mois !  

Après ma soutenance, je me suis finalement établie à Paris afin de rejoindre l’équipe de Regimbeau. J’ai ainsi atteint la destination vers laquelle je tendais il y a 6 ans, mais en empruntant un chemin plus tortueux que prévu.  

Qu’est-ce qui vous a donné envie de suivre une carrière dans les sciences et l’ingénierie ?

J’ai toujours été curieuse du monde qui m’entourait, et dans mon esprit de petite fille, devenir ingénieure signifiant avoir la réponse à toutes mes questions (ce n’est pas sans lien avec le fait que mon père soit ingénieur de formation).  

Ce sont mes parents qui m’ont poussée ensuite à faire des études scientifiques. En grandissant, le métier d’ingénieur était devenu très nébuleux, les quelques adultes « ingénieurs » dont j’étais entourée parlant peu de leurs activités professionnelles. J’étais tout aussi attirée par d’autres activités plus concrètes et manuelles, les métiers de la restauration notamment. Deux domaines où il est encore aujourd’hui difficile de trouver une place en tant que femme.  

C’est grâce à un ami de la famille que j’ai découvert tôt la propriété industrielle. Voir quelqu’un parler avec autant de passion de son métier avait suscité mon intérêt. J’ai rarement rencontré dans ma vie d’autres personnes aussi investies et enthousiastes pour leur travail. Une fois en école d’ingénieur, il m’avait conseillé Regimbeau pour la qualité de leur formation interne, et mon stage de césure ne l’a pas démenti !  

En quoi consiste votre rôle d’ingénieure brevets au quotidien ? 

Le métier d’ingénieure brevets présente de multiples facettes. La majorité du temps, à mon niveau, est consacré au suivi de dossiers pour nos clients. En général, nous échangeons d’abord avec des inventeurs, afin qu’ils nous présentent leur invention. Nous les aidons à identifier plus précisément ce qu’ils veulent protéger, et rédigeons pour eux une demande de brevet. Nous les accompagnons ensuite au cours de la procédure d’examen devant les offices français ou européen, jusqu’à la délivrance du brevet. Il y a souvent de réels enjeux pour nos clients, et, au-delà d’être de simples « conseils » juridiques, nous les aidons à définir la stratégie la plus adaptée à leur profil en leur apportant notre expérience comme « business partners ».  

De manière plus anecdotique, j’ai l’occasion de réaliser des missions de veille technologique ou des études de liberté d’exploitation pour guider nos clients dans le développement de leurs produits innovants. D’autres aspects de contentieux concernent la défense de leurs propres droits de PI ou de l’exploitation de leurs produits.   

Au-delà de mes connaissances juridiques qui s’étoffent par la pratique et par la formation continue, mon rôle d’ingénieure brevets requiert une excellente compréhension des problèmes techniques et des inventions rencontrés, dans des domaines techniques très variés. La formation scientifique pluridisciplinaire dont j’ai bénéficié m’aide beaucoup au quotidien, et me permets de jongler entre des systèmes de refroidissement de turbomachine, des procédés de correction de mesures biochimiques ou encore des stents biodégradables. J’apprécie beaucoup la diversité des sujets que je traite au quotidien !  

Quels sont, selon vous, les défis spécifiques rencontrés par les femmes dans les domaines scientifiques et technologiques ? 

Je pense qu’il y a encore beaucoup d’auto-censure chez les jeunes filles et d’appréhension à se lancer dans des études scientifiques. En participant à des programmes de mentorat ou en témoignant dans des collèges ou lycées, avec les associations Femmes et Maths ou Du Cher aux Grandes Ecoles, j’ai quand même noté une évolution positive ces dernières années.  

Bien sûr, on ne peut pas changer la société en claquant des doigts, mais les témoignages de femmes ayant réussi à se faire une place dans ces domaines compétitifs et encore majoritairement masculins contribuent à faire évoluer les mentalités.  

Les choses sont en train de changer, pour le mieux. Le domaine de la PI s’est beaucoup féminisé par rapport à d’autres domaines scientifiques, et Regimbeau en est un bon exemple, puisque la majorité des associés sont aujourd’hui des femmes !  

Comment votre travail contribue-t-il à la promotion de l’innovation scientifique et technologique ? 

Je trouve qu’il y a presque un aspect de service publique dans notre métier. La publication des demandes de brevets permet de diffuser largement des connaissances technologiques de pointe, bien plus que des publications scientifiques qui sont trop rarement en libre accès.  

En aidant nos clients à protéger leurs inventions, nous leur permettons de faire prospérer leur entreprise et de continuer à innover, puisque le brevet est un titre de propriété qui permet de leur garantir un monopole d’exploitation sur leurs produits, mais aussi un actif qu’ils peuvent valoriser.   

Quel message aimeriez-vous adresser aux jeunes filles qui envisagent une carrière dans les sciences ou la propriété intellectuelle et quels conseils leur donneriez-vous ? 

N’ayez pas peur !  

Je pense qu’il faut oser rêver grand et ne pas avoir honte d’avoir de l’ambition, même (voire surtout) quand on est une femme. C’est évidemment plus facile à dire qu’à faire, mais je pense qu’en normalisant des figures de femmes fortes et compétentes dans les domaines scientifiques et technologiques, nous pourrions changer de paradigme.  

Un autre conseil que je donnerai aussi est de faire en premier lieu un métier qu’on aime, sans trop prendre en compte le jugement des autres, sans craindre de décevoir nos proches. Je pense qu’en tant que femmes, on est habitué depuis l’enfance à être jugé et donc à chercher à répondre à des attentes extérieures, et qu’il est plus difficile de s’affirmer. C’est pourtant nécessaire pour s’épanouir professionnellement !  

Comment voyez-vous l’évolution de la place des femmes dans les sciences et l’innovation dans les prochaines années ? 

Je pense que ma génération est plus sensible à la place des femmes dans la société et notamment dans les domaines scientifiques. J’ai donc grand espoir que la situation s’améliore ! Sans tomber dans les clichés, je pense que les femmes peuvent apporter une vision différente, et même contribuer davantage que les hommes à un avenir plus social, écologique et solidaire, pour tendre à un modèle de société qui saura tirer profit des innovations scientifiques.  

Publié par

Jeanne Redaud, Ph.D

Ingénieur Brevets