Paris, Le 16 août 2018 – La Loi n° 2018-670 du 30 juillet 2018 relative à la « protection du secret des affaires » a été publiée au Journal Officiel n°0174 le 31 juillet 20181.
Cette Loi transcrit en Droit National la Directive 2016/943 du Parlement européen et du Conseil du 8 juin 2016 sur « la protection des savoir-faire et des informations commerciales non divulgués (secrets d’affaires) contre l’obtention, l’utilisation et la divulgation illicite ».
Pour mémoire, saisi par des opposants2 voyant dans ce texte un outil de censure et une limitation du droit d’alerte, le Conseil Constitutionnel a déclaré le texte conforme par décision du 26 juillet 2018.
Rappelons que la Directive européenne 2016/943 a pour objectif « d’harmoniser les règles nationales en matière de protection de secret d’affaires » et de « renforcer la protection des entreprises innovantes vis-à-vis de pratiques malhonnêtes trouvant leur origine à l’intérieur ou en dehors de l’Union, et qui visent l’appropriation illicite de secrets d’affaires, tels que le vol, la copie non autorisée, l’espionnage économique ou le non-respect d’exigences de confidentialité ».
Définition
La Loi 2018-670 donne en premier lieu une définition des informations concernées par le secret des affaires, triplement caractérisée : les informations doivent 1) avoir un caractère secret c’est-à-dire qu’elles ne doivent pas être connues ou être aisément accessibles, 2)avoir une valeur commerciale et 3) avoir fait l’objet de mesures raisonnables prises par le détenteur légitime pour conserver le secret.3
Lawful acts
La Loi 2018-670 définit une série d’actes licites. « Une découverte ou une création indépendante », ainsi que « l’observation, l’étude, le démontage ou le test d’un produit ou d’un objet qui a été mis à la disposition du public ou qui est de façon licite en possession de la personne qui obtient l’information, sauf stipulation contractuelle interdisant ou limitant l’obtention du secret », constituent des modes d’obtention licites d’un secret des affaires.
Actes illicites
La Loi 2018-670 prévoit ensuite une série d’actes illicites.
a) Accès non autorisé et comportement déloyal
« L’obtention d’un secret des affaires est illicite lorsqu’elle est réalisée sans le consentement de son détenteur légitime et qu’elle résulte :
- d’un accès non autorisé à tout document, objet, matériaux, substance ou fichier numérique qui contient le secret ou dont il peut être déduit, ou bien d’une appropriation ou d’une copie non autorisée de ces éléments, ainsi que
- de tout autre comportement considéré, compte-tenu des circonstances, comme déloyal et contraire aux usages en matière commerciale ».
b) Violation d’une obligation
Est également considéré illicite, « l’utilisation ou la divulgation d’un secret des affaires réalisée sans le consentement de son détenteur légitime par une personne qui agit en violation d’une obligation de ne pas divulguer le secret ou de limiter son utilisation ».
c) Exploitation d’un produit lié à une atteinte au secret des affaires
La loi ne cantonne pas le périmètre des actes illicites à l’obtention ou la communication d’informations. Elle étend le champ des actes illicites à l’exploitation « de tout produit résultant de manière significative d’une atteinte au secret des affaires » lorsque la personne qui exerce ces activités savait ou aurait dû savoir au regard des circonstances, que ce secret était utilisé de façon illicite4.
1 Bien que définitivement adoptée par l’Assemblée Nationale et le Sénat et promulguée par le Président de la République après déclaration conforme du Conseil Constitutionnel, l’entrée en application de cette loi reste encore incertaine puisqu’elle prévoit en son article 1 in fine que « les conditions d’application du titre V relatif à la Protection du Secret des Affaires sont fixées par décret en Conseil d’Etat ».
2 Notamment suite à de nombreuses réclamations émanant du monde du journalisme.
3 Selon la Loi 2018-670, une information relevant du secret des affaires est :
1) une information qui n’est pas, en elle-même ou dans la configuration et l’assemblage exact de ces éléments, généralement connue ou aisément accessible pour les personnes familières de ce type d’information en raison de leur secteur d’activité,
2) qui revêt une valeur commerciale, effective ou potentielle, du fait de son caractère secret, et
3) qui fait l’objet de la part de son détenteur légitime de mesures de protection raisonnables, compte-tenu des circonstances, pour en conserver le caractère secret.
4 La production, l’offre ou la mise sur le marché, de même que l’importation, l’exportation ou le stockage à ces fins de tout produit résultant de manière significative d’une atteinte au secret des affaires sont également considérés comme une utilisation illicite lorsque la personne qui exerce ces activités savait ou aurait dû savoir au regard des circonstances, que ce secret était utilisé de façon illicite.