Loi Pacte : quels changements pour votre propriété industrielle en France ? Quel calendrier ?

La loi PACTE pour Plan d’Action pour la Croissance et la Transformation des Entreprises a été publiée au Journal Officiel le 23 mai 2019 (loi n°2019-486 du 22 mai 2019). Ce texte concrétise la réforme économique phare du gouvernement d’Emmanuel Macron, portée par Bruno Le Maire, ministre de l’économie. L’objectif premier affiché est d’améliorer la croissance des TPE et PME françaises.

Paris, le 3 juin 2019 – La loi PACTE pour Plan d’Action pour la Croissance et la Transformation des Entreprises a été publiée au Journal Officiel le 23 mai 2019 (loi n°2019-486 du 22 mai 2019).

Ce texte concrétise la réforme économique phare du gouvernement d’Emmanuel Macron, portée par Bruno Le Maire, ministre de l’économie. L’objectif premier affiché est d’améliorer la croissance des TPE et PME françaises.

Le texte final, longuement débattu à l’Assemblée Nationale et au Sénat, y compris pour les dispositions concernant la propriété industrielle, comprend 197 articles (221 articles dont 24 articles abrogés par la décision du Conseil Constitutionnel n° 2019-781DC du 16 mai 2019) dont la section « Protéger les inventions de nos entreprises », en particulier les Articles 118, 121, 122 et 124 qui nous intéressent ici car ils concernent le Code de la Propriété Intellectuelle (ci-après CPI).

Il est intéressant de noter tout de suite que chacun de ces quatre articles présente sa propre date d’entrée en vigueur, sachant que la date d’entrée en vigueur de certains coïncidera bien sûr avec celle de ses nécessaires mesures d’application.

Certificat d’utilité : allongement de la durée et possible transformation en demande de brevet (Art 118)

Date d’entrée en vigueur : 23 mai 2020 au plus tard

En son Article 118, la loi PACTE allonge la durée du certificat d’utilité de 6 à 10 ans (Article L. 611-2 CPI) et complète l’article L. 612-15 CPI par un alinéa disposant que :

« Le demandeur peut transformer sa demande de certificat d’utilité en demande de brevet, dans un délai et selon une procédure précisés par voie réglementaire. ».

Ces dispositions entrent en vigueur à la date de publication du texte réglementaire prévu au second alinéa de l’article L. 612-15 CPI, et au plus tard à l’expiration du douzième mois suivant la publication de la présente loi, soit le 23 mai 2020.

Instauration d’un nouvel outil : la procédure d’opposition aux brevets français nationaux délivrés par l’INPI (Art 121)


Date d’entrée en vigueur : celle d’une loi de ratification d’une ordonnance prévue par l’article 121, l’ordonnance devant être prise dans un délai maximum de 9 mois à compter de la promulgation de la loi PACTE le 22 mai 2019, soit avant le 22 février 2020) et le projet de loi de ratification devant être déposé au Parlement dans un délai de 6 mois de la publication de l’ordonnance.

En son article 121, la loi PACTE autorise le Gouvernement à prendre par voie d’ordonnance les mesures relevant du domaine de la loi, nécessaires pour :

1° Créer un droit d’opposition aux brevets d’invention délivrés par l’Institut national de la propriété industrielle afin de permettre aux tiers de demander par voie administrative la révocation ou la modification d’un brevet, tout en veillant à prévenir les procédures d’opposition abusives ;

2° Prévoir les règles de recours applicables aux décisions naissant de l’exercice de ce droit.

La loi PACTE lance donc le processus législatif pour aboutir à une procédure d’opposition sans cependant en dessiner les contours qui apparaitront dans l’ordonnance puis les textes réglementaires. Il est toutefois probable que cette procédure s’approche de celle de l’OEB avec une importante interrogation : quelle sera l’instance de recours ? Deux possibilités : la création de Chambres de Recours au sein de l’INPI ou le traitement des recours par la Cour d’Appel de Paris. Il ressort des discussions entre les associations professionnelles et l’INPI qu’il est envisagé que les recours soient traités par la Cour d’Appel de Paris, ce qui risque de proposer aux parties une procédure de recours beaucoup plus longue que la procédure de 1ère instance.

Examen de l’activité inventive des demandes de brevet français : une petite révolution ! (Art 122)

Date d’entrée en vigueur : demandes de brevet déposées à compter du 22 mai 2020

En son Article 122, la loi PACTE introduit dans l’article L. 612-12, alinéa 7 CPI, l’activité inventive comme motif de rejet. Le mot « manifestement » a également été supprimé de l’alinéa 4 :

4°  « Qui a pour objet une invention manifestement non brevetable en application des articles L611-16 à L611-19 »

C’est un changement important pour les déposants et les professionnels qui pratiquaient jusque-là des demandes de brevet français délivrés pour des inventions nouvelles. Ce changement est maintenant entériné après de longues discussions, les uns défendant cette réforme comme un progrès vers un brevet français plus fort et un attribut de la future procédure d’opposition, les autres s’y opposant redoutant un allongement de la procédure de délivrance et une augmentation des coûts.

Délais de prescription : une clarification attendue (Art 124)

Application dans le temps des dispositions concernant l’imprescriptibilité des actions en nullité : s’applique aux titres en vigueur au jour de la publication de la loi PACTE, soit le 23 mai 2019, sans effet sur les décisions ayant force de chose jugée.

En son Article 124, la loi PACTE vient clarifier une jurisprudence divergente en entérinant l’imprescriptibilité des actions en nullité en matière de dessin ou modèle (Art. L. 521-3-2. CPI), de brevet (Art. L. 615-8-1 CPI), de certificat d’obtention végétale (Art. L. 623-29-1 CPI) et de marque (Art. L. 714-3-1 CPI).

Cet article permet également une harmonisation avec l’article 2224 du code civil du point de départ du délai de prescription des actions en contrefaçon « à compter du jour où le titulaire d’un droit a connu ou aurait dû connaître le dernier fait lui permettant de l’exercer » en matière de dessin ou modèle (Art. L. 521-3 CPI), de brevet (Art. L. 615-8 CPI), de certificat d’obtention végétale (Art. L. 623-29 CPI), de marque (Art. L. 716-5 CPI) et de même du point de départ des actions relatives à une atteinte au secret des affaires (Art. L. 152-2 du code de commerce).

L’application dans le temps aux faits antérieurs à la date d’entrée en vigueur de la loi Pacte sera déterminée par le Jurisprudence à venir. 

La version finale de la loi PACTE aboutit à un jeu de dispositions cohérent entre un brevet national français plus fort et une procédure d’opposition et un certificat d’utilité sans examen plus long et transformable en demande de brevet.

Ce sont pourtant des dispositions qui ont été additionnées dans ce texte et ont connu une histoire et des débats décorrélés. L’allongement de la durée du certificat d’utilité était présent dans la version initiale de la loi PACTE pour répondre à une volonté du gouvernement d’un brevet « provisoire » alors que l’introduction de l’activité inventive comme motif de rejet est apparue par voie d’amendement, amendement rejeté par le Sénat et finalement adopté par l’Assemblée Nationale. Ces changements sont importants pour les déposants et les professionnels avec des dates d’entrée en vigueur différentes qu’il va falloir anticiper et des dispositions complémentaires à venir dont, bien entendu, nous vous informerons.

A noter que l’article 121 prévoit de rendre applicables en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française et à Wallis-et-Futuna les articles du code de la propriété intellectuelle et permet de procéder aux adaptations nécessaires des articles en ce qui concerne les collectivités de Saint-Barthélemy, de Saint-Martin et de Saint-Pierre-et-Miquelon.

Publié par

Stéphanie Massin Célaire

Associée