Directives sur la nouvelle procédure d’opposition brevets en France (5/5) : Décision et recours

La série d'articles dédiée à la publication des directives complètes sur la procédure d’opposition brevet touche à sa fin avec ce cinquième article qui aborde l’ultime étape de l’opposition, la décision, et en esquisse les suites possibles.

Paris, le 19 avril 2021 – En janvier 2021, l’Institut national de la propriété industrielle (INPI) a publié ses directives complètes sur la procédure d’opposition brevet. Ces directives constituent la dernière pierre de l’édifice des textes légaux sur le sujet, et dont la construction a débuté avec l’article 121 de la loi PACTE du 22 mai 2019. Il est désormais possible d’avoir une vision claire de la procédure. A cette occasion, nous publions une série de cinq articles au travers desquels nous établissons un panorama des principaux aspects de la procédure d’opposition et des questions qui restent en suspens. Cette série touche à sa fin en abordant l’ultime étape de l’opposition, la décision, et en esquissant les suites possibles.

La phase de décision

La phase de décision débute à partir de la fin de de la phase d’instruction. La commission d’opposition rédige une décision et la notifie, ce qui clôt alors la phase de décision.

Si la décision fait droit à l’opposition, le brevet est selon les cas révoqué totalement, révoqué en partie, ou maintenu modifié (L.613-23-4 du code de la propriété intellectuelle). Si la décision rejette l’opposition, le brevet est maintenu tel que délivré.

S’il n’est pas statué sur l’opposition dans les quatre mois à compter de la fin de la phase d’instruction, l’opposition est réputée rejetée (L.613-23-2 CPI).

Révocation partielle et maintien sous forme modifiée, quelle différence ?

Les Directives tentent de clarifier la différence entre les deux

L’opposition aboutit à un maintien sous forme modifié lorsque la décision maintient le brevet conformément à une proposition de modification soumise par le titulaire du brevet.

La seule situation de révocation partielle identifiée apparaît être celle où certaines revendications sont révoquées alors que l’opposant en a demandé la révocation et uniquement de celles-ci, et non pas la révocation de la totalité du brevet, et que le breveté n’a pas déposé de requête dans laquelle ces revendications sont supprimées.
Les Directives ne donnent pas d’explication générale, seulement cet exemple particulier (B, 3.3.2.b.). Il apparaît qu’il s’agit du pendant de la révocation totale lorsque l’opposant n’a pas demandé la révocation de tout le brevet. Toutefois ceci devra être confirmé par la jurisprudence.

En cas de révocation partielle, le titulaire est renvoyé devant l’INPI pour faire une demande de modification de son brevet conformément à la décision de révocation partielle lorsque la décision n’est plus susceptible de recours (L.613-23-6). Le titulaire n’a pas de délai imparti pour faire sa demande de modification (Directives B, 3.4.2.), mais il ne pourra pas obtenir de limitation de son brevet tant que le brevet n’aura pas été mis en conformité avec la décision d’opposition.

Répartition des frais

La règle générale est que chaque partie supporte les frais qu’elle a exposés (L.613-23-5).

Toutefois la décision peut répartir différemment les frais « si l’équité l’exige, c’est à dire lorsque des frais sont imputables à une partie à cause d’une faute commise par négligence ou par mauvaise foi de l’autre partie » (Directives B, 3.3.3.). Les Directives donnent l’exemple d’éléments tardifs présentés sans motif valable et entraînant des frais supplémentaires. Cette situation ne semble pouvoir se produire que lorsque les éléments tardifs n’ont pas été rejetés pour leur caractère tardif, probablement parce qu’ils sont pertinents. La jurisprudence devra préciser les cas où l’équité exige une telle répartition.

Le montant maximal mis à la charge des parties par répartition des frais est limité de la manière suivante (Directives B, 3.3.3.) :

  • Pour les frais exposés au titre de la phase écrite : 600 € max
  • Pour les frais exposés au titre de la phase orale : 100 € max
  • Pour les frais de représentation : 500 € max

La marge de manœuvre pour la répartition des frais apparaît donc limitée. L’intérêt d’un recours sur ce point uniquement sera donc faible.

Recours

Un recours en réformation de la décision d’opposition est possible devant la cour d’appel de Paris (R.411-19 & D.411-19-2 CPI). Ce recours défère à la cour la connaissance de l’entier litige, la cour statuant en fait et en droit. A cette occasion, les parties peuvent invoquer des moyens nouveaux, produire de nouvelles pièces ou proposer de nouvelles preuves (R.411-38 CPI).

Le délai de recours débute à compter de la réception de la notification de la décision. Il est d’un mois (R.411-21 CPI). A compter de cet acte, le demandeur dispose d’un délai de trois mois pour remettre ses conclusions (R.411-29 CPI) au greffe et au directeur général de l’INPI.

Ces délais sont augmentés d’un mois pour un requérant demeurant outre-mer, et de deux mois pour un requérant demeurant à l’étranger (R.411-43 CPI).

A l’occasion du recours, les tiers peuvent intervenir dans certaines conditions.

Les Directives ont permis de clarifier de nombreux points de la procédure d’opposition, notamment le déroulement de la phase orale, et d’assurer ainsi une certaine sécurité juridique. Pour les points restants, il faudra attendre une mise à jour des textes ou leur traitement par la jurisprudence. En attendant, Regimbeau est à votre disposition pour analyser tout aspect nécessitant d’être étudier vis-à-vis d’un cas d’espèce vous concernant !

Publié par

Stéphanie Massin Célaire

Associée