Petit rappel historique :
En 1998, a été adoptée la directive du Parlement européen et du Conseil sur la protection juridique des dessins et modèles avec pour objectif d’uniformiser les législations nationales en matière de dessins et modèles pour ne pas fausser le jeu de la concurrence en Union européenne.
Toutefois, lors de l’élaboration de cette directive, tous les États ne se sont pas entendus concernant la protection des pièces de rechange. Aucun accord n’a donc été trouvé sur ce point.
Résultat ? Les législations nationales au sein de l’Union européenne étaient disparates, certaines ayant inclus une clause de réparation permettant la commercialisation de pièces de rechanges protégées par dessins et modèles de tiers et d’autres non… Par ailleurs, les conditions permettant l’application de ces clauses de réparations, quand elles existaient, étaient elles-mêmes différentes d’un pays à un autre.
Qu’en est-il aujourd’hui en France ?
Pour rappel, en Union européenne, il est possible d’obtenir une protection par dessins et modèles :
- Via un dépôt auprès de l’EUIPO pour obtenir un modèle communautaire, ce qui confrère un droit sur l’ensemble du territoire de l’Union européenne,
- Via des dépôts nationaux effectués auprès des offices de propriété industriels de chaque pays.
Des modèles communautaires ainsi que des modèles français sont ainsi en vigueur en France.
Le règlement créant la protection des dessins et modèles communautaires a inclus une clause de réparation qui a par la suite été précisée par la jurisprudence.
Depuis le 1er janvier 2023, la France a également adopté une clause de réparation.
Pour autant les conditions d’application de ces clauses sont très différentes.
Il existe donc deux régimes différents en France selon la voie de protection choisie (communautaire ou nationale).
Aussi, pour pouvoir commercialiser une pièce de rechange en France, il convient en premier lieu de vérifier si la pièce est protégée par un dessins et modèle déposé et si oui lequel : français et/ou communautaire ?
Si elle est protégée par un modèle français, une pièce de rechange peut être commercialisée par un tiers si :
- la pièce est à destination de véhicules ou remorques (limite sectorielle) ; et
- elle constitue ou pièce de vitrage ;
- ou, si elle ne constitue pas une pièce de vitrage, celui qui entend la commercialiser est l’équipementier de première monte.
Si elle est protégée par un modèle communautaire, une pièce de rechange peut être commercialisée par un tiers :
- quel que soit le type de pièce (pas de limite sectorielle) ;
- si la pièce est identique à celle incorporée dans le produit complexe même si l’apparence du produit complexe (un véhicule par exemple) ne conditionne pas celle du dessins ou modèle protégé (un capot ou une jante par exemple) ; et
- si le fabriquant ou le vendeur a informé le consommateur sur l’origine du produits et ses fins de réparation.
Si la pièce est protégée par un modèle communautaire et un modèle français, les conditions doivent être cumulées.
Qu’en sera-t-il demain ?
Une nouvelle directive et un règlement viennent d’être ratifiés par le Conseil de l’Europe et incorporent une nouvelle clause de réparation. Les États membres disposeront d’un délai de 36 mois pour transposer les dispositions de la directive. Le règlement sur les dessins ou modèles de l’Union européenne sera applicable dans toute l’Union européenne dès qu’il entrera en vigueur.
La nouvelle clause de réparation est très proche de celle applicable aujourd’hui aux dessins et modèles communautaires.
Ainsi, une pièce de rechange protégée par modèle pourra être commercialisé par un tiers :
- quel que soit le type de pièce (pas de limite sectorielle) ;
- si la pièce est identique à celle incorporée dans le produit complexe et que son apparence est conditionnée par celle du produit complexe ; et
- si le fabriquant ou le vendeur a informé le consommateur sur l’origine du produits et ses fins de réparation, et de l’identité du fabricant de ce produit.
A noter que le fabricant ou le vendeur ne sera pas tenu de garantir que ces pièces sont bien utilisées par les utilisateurs finaux dans le seul but d’effectuer des réparations visant à rétablir l’apparence initiale du produit complexe.
L’harmonisation est donc proche mais la directive prévoit des dispositions transitoires pendant 8 ans.
Il reste donc nécessaire d’examiner précisément les titres en vigueur sur le territoire français et européen et définir, le cas échéant, les modalités d’information des consommateurs avant d’entreprendre la mise sur le marché de pièces détachées.
Les équipes de Regimbeau se tiennent à votre disposition pour vous conseiller et sécuriser la mise sur le marché de vos produits !
Publié par
Caroline Huguet-Braun
Responsable du Bureau de Rennes