Nouveaux outils pour accélérer la délivrance de vos brevets

Récemment, les outils permettant aux déposants français ou plus généralement européens d’accélérer la procédure de délivrance de certains de leurs brevets dans différents pays se sont multipliés, en particulier grâce au développement des programmes PPH auxquels participe l’OEB.

Récemment, les outils permettant aux déposants français ou plus généralement européens d’accélérer la procédure de délivrance de certains de leurs brevets dans différents pays se sont multipliés, en particulier grâce au développement des programmes PPH (Patent prosecution highway) auxquels participe l’Office européen des brevets (OEB). De plus, l’OEB a mis récemment en place un nouveau service susceptible de faciliter l’accès à ces programmes PPH : la procédure « PCT Direct ».

Il existe au niveau international une volonté de plus en plus forte d’harmonisation, de simplification et d’accélération des procédures de délivrance de brevets, sans pour autant altérer la qualité des examens réalisés. Cette volonté s’inscrit dans le contexte économique difficile de ces dernières années, qui pousse aussi bien les offices que les déposants à essayer de limiter les coûts des procédures d’examen.

C’est dans ce cadre que s’inscrit le développement de programmes d’abord bilatéraux puis multilatéraux entre offices de brevets, appelés programmes PPH. Ces programmes, initiés par l’office japonais des brevets, partent du principe qu’il est inefficace, aussi bien pour les offices que pour les déposants, de recommencer ab initio l’examen d’une demande de brevet dans chaque pays, en particulier lorsqu’un office a déjà conclu que certaines revendications sont brevetables avant même que l’examen ne commence dans un autre pays.

Sur cette base, les offices participants à ces programmes proposent un examen accéléré lorsqu’une requête de traitement selon le programme PPH est déposée avant le début de l’examen, sur la base de revendications correspondant à celles considérées acceptables par un office partenaire.

Ces programmes ne garantissent pas que l’examen sera simplifié, notamment parce que les dispositions régissant l’appréciation de certaines conditions de brevetabilité diffèrent d’un pays à un autre.

Toutefois, la philosophie à la base de ces programmes vise à limiter l’examen autant que possible. De plus, les statistiques montrent que les taux de délivrance sont plus élevés pour les demandes traitées par le programme PPH que pour l’ensemble des demandes, et notre expérience récente est qu’une simplification de la procédure est observée dans certains cas.

La participation à un programme PPH est conditionnée par l’existence d’une opinion positive d’un office partenaire avant que l’examen n’ait commencé auprès des autres offices membres du programme. La nouvelle procédure PCT Direct mise en place récemment par l’OEB peut notamment permettre de faciliter l’obtention d’une opinion positive de l’OEB dès le stade international. Elle s’inscrit donc parmi les outils susceptibles de permettre une accélération, et potentiellement une simplification, des procédures nationales de délivrance.

Les points clés à connaitre pour pouvoir intégrer ces deux types de procédure aux outils usuels de gestion des procédures de délivrance sont résumés ci-dessous.

Accès aux programmes PPH pour les déposants français

Dans quel cas peut-on requérir un traitement accéléré sur la base d’un programme PPH ?

Initialement assez restrictives, les conditions d’accès aux programmes PPH ont été assouplies. Généralement, il sera suffisant de remplir les trois conditions suivantes :

  • (1)Au moins une revendication a été considérée brevetable pour une demande de la même famille par un premier office membre d’un programme PPH,
  • (2)Les revendications déposées pour l’examen auprès d’un deuxième office membre de ce programme PPH correspondent suffisamment à celles jugées brevetables par le premier office, et
  • (3)L’examen auprès du deuxième office n’a pas encore commencé mais a été requis au plus tard en même temps que le dépôt de la requête de traitement selon le programme PPH.

Quels sont les programmes PPH accessibles sur la base d’une opinion positive de l’OEB ?

Pour les déposants français, la première opinion positive qui est obtenue émane très souvent de l’OEB. Une opinion positive peut notamment être émise par l’OEB à l’occasion de l’une et/ou l’autre des trois étapes suivantes situées avant les entrées en phases nationales : avec le rapport de recherche émis pour la demande de priorité (EP, FR, ou PCT par exemple), avec le rapport de recherche internationale de la demande PCT, ou avec le rapport d’examen préliminaire international de la demande PCT.

Par conséquent, les principaux programmes PPH dont les déposants français peuvent bénéficier sont les programmes auxquels adhère l’OEB.

Longtemps, ces programmes ont été cantonnés à des programmes bilatéraux avec les offices américain et japonais. Cependant, depuis le 6 janvier 2014, l’OEB fait partie d’un programme PPH multilatéral, le programme IP5, qui réunit, outre l’OEB, les offices américain, japonais, chinois et coréen.

De plus, trois nouveaux programmes bilatéraux ont été mis en place depuis le 6 janvier 2015. Il est ainsi également possible de bénéficier d’un traitement accéléré selon le PPH au Canada, au Mexique, en Israël, et à Singapour.

Dans quels autres cas faut-il penser aux programmes PPH ?

Bien que plus rare, il peut arriver qu’une notification de délivrance d’un office autre que l’OEB soit reçue dans une famille de demandes de brevet, alors que l’examen n’a pas encore commencé dans certains pays, notamment ceux où l’examen peut être reporté une ou plusieurs années après l’entrée en phase nationale (Canada et Japon, par exemple).

Il convient alors de noter qu’un autre programme PPH multilatéral est en place depuis le 6 janvier 2014 : le programme Global PPH (GPPH). Ce programme regroupe actuellement les offices de 19 pays, et notamment des pays suivants : Australie, Canada, Israël, Japon, Corée, Russie, Singapour et USA.

Sur la base d’une notification de délivrance dans l’un de ces pays, il est donc également possible de requérir un traitement accéléré selon le programme GPPH dans l’un des autres pays partenaires de ce programme où l’examen n’a pas encore commencé.

Quel est le coût associé à l’utilisation des programmes PPH ?

A ce jour, aucune taxe officielle n’est associée au dépôt d’une requête de traitement selon un programme PPH. La requête doit cependant être accompagnée d’un certain nombre de documents et traductions éventuelles. Des honoraires de préparation de la requête et de ses pièces jointes sont donc à prévoir.

En outre, dans la mesure où un traitement selon un programme PPH conduit à accélérer la procédure d’examen, certains frais seront avancés par rapport à une procédure classique.

Néanmoins, dans le cas où la procédure serait simplifiée (ce qui ne peut pas être garanti), le coût global de la procédure peut se trouver diminué.

La procédure « PCT Direct »

Quel déposant n’a pas déjà fait la désagréable expérience de modifier sa demande PCT (discussion dans la description des arts antérieurs identifiés pour la demande de priorité, limitation éventuelle des revendications) dans l’espoir de surmonter les objections soulevées par l’OEB dans l’opinion écrite émise pour la demande de priorité, et de recevoir ensuite un rapport de recherche internationale et une opinion écrite strictement identiques à celles émises pour la demande de priorité ?

La nouvelle procédure « PCT Direct » mise en place par l’OEB depuis le 1er novembre 2014 vise à répondre aux demandes récurrentes des déposants et mandataires européens que leurs efforts pour surmonter les objections soient pris en considération lors de la préparation du rapport de recherche internationale et de l’opinion écrite associée.

Le principe :

Il s’agit, pour les déposants d’une demande internationale (demande PCT) qui revendique la priorité d’une demande antérieure ayant déjà fait l’objet d’une recherche par l’OEB (ex : une demande européenne, mais aussi une demande française), de répondre par des observations informelles à toute objection soulevée dans l’avis établi pour la demande dont la priorité est revendiquée.

En pratique :

Pour bénéficier de cette procédure, les déposants doivent soumettre ces observations informelles lors du dépôt de la demande PCT sous forme d’un document distinct (lettre « PCT Direct »), et lister cette lettre dans la requête PCT.

Les observations informelles peuvent consister en :

  • des arguments concernant la brevetabilité des revendications de la demande internationale, et
  • le cas échéant, des explications concernant des modifications apportées aux pièces (revendications notamment) de la demande PCT par rapport à la demande antérieure.
    Dans ce cas, les déposants sont invités à joindre une copie annotée de la demande PCT faisant apparaitre les différences.

Il ne sera pas fait expressément référence à la lettre PCT Direct ou à son contenu dans l’opinion écrite. Néanmoins, l’Examinateur chargé de la recherche internationale tiendra compte de ces observations informelles lorsqu’il établira le rapport de recherche internationale et l’opinion écrite.

Les lettres PCT Direct seront accessibles au public dans le dossier de la demande PCT, sur le portail PATENTSCOPE de l’OMPI.

Quel est le coût associé à cette procédure ?

Aucune taxe officielle n’est associée à cette procédure. Il convient cependant de prévoir le coût associé à la préparation des observations informelles, qui peut être considéré comme similaire à celui de la préparation d’une réponse à un rapport de recherche ou à une lettre officielle.

Dans certains cas, une adaptation du texte (limitation des revendications, complément à insérer dans la description) sera également nécessaire. Une telle adaptation est toutefois généralement déjà faite dans le cadre de la préparation du texte de la demande PCT.

Dans quels cas utiliser cette procédure ?

Pour un déposant qui souhaite bénéficier des programmes PPH accessibles sur la base d’une opinion positive de l’OEB lors des phases nationales, cette nouvelle procédure constitue une première étape de discussion avec l’Examinateur de l’OEB.

Dans les cas simples (objections mineures, incompréhension manifeste de l’Examinateur, limitation simple des revendications permettant clairement de surmonter l’objection et acceptable pour le déposant), cette procédure peut potentiellement permettre d’obtenir une opinion positive de l’OEB dès le stade international, sans avoir à passer par la procédure plus coûteuse de l’examen préliminaire international.

C’est alors avantageux sur le plan financier, puisque si le coût associé à la préparation des observations informelles devrait être similaire à celui de la préparation des observations accompagnant la requête d’examen préliminaire international, aucune taxe officielle n’est associée à la procédure PCT Direct, contrairement à l’examen préliminaire international (taxes officielles supérieures à 2000 €).

Dans les cas plus complexes, cette procédure serait plutôt à réserver aux cas où :

  • une recherche incomplète (défaut d’unité d’invention, problème de clarté ne permettant pas une recherche complète) a été réalisée pour la demande de priorité, et cette recherche incomplète ne permettra pas une protection acceptable de votre invention.
    Dans certains cas, des explications techniques, éventuellement associées à des modifications des revendications, pourraient permettre d’obtenir une recherche plus satisfaisante au stade PCT ;
  • il est essentiel pour des raisons stratégiques d’obtenir rapidement une opinion positive (par exemple, en cas de discussions avec des investisseurs ou des partenaires qui ne souhaitent pas s’engager sans une opinion positive), ou des brevets délivrés (par exemple, lorsqu’un contrefacteur a été identifié très tôt).
    En engageant le dialogue avec l’Examinateur le plus tôt possible, les chances de le convaincre pendant la phase internationale et de pouvoir bénéficier d’un examen accéléré selon le PPH dans un maximum de pays sont augmentées.

Il reste à vérifier dans quelle mesure les observations informelles déposées selon cette procédure seront prises en compte par les Examinateurs. Néanmoins, la mise en place de cette procédure est un signe que l’OEB est à l’écoute des préoccupations des déposants.

Les procédures présentées ci-dessus ne sont bien sûr pas adaptées à toutes les circonstances et tous les dossiers. Il est néanmoins important de les prendre en compte parmi la palette d’outils à la disposition des déposants pour optimiser la gestion de leur portefeuille.

Nous restons à votre disposition pour vous fournir toute information complémentaire à ce sujet et vous conseiller, au cas par cas, la stratégie la plus adaptée à votre situation. N’hésitez pas à contacter les personnes qui sont vos interlocuteurs habituels chez REGIMBEAU.

Publié par

Cécile Puech, Ph.D

Conseil Senior