Marque : le Tribunal de l’Union Européenne déclare le singe dominant

Ce jugement confirme l’intérêt de la marque de l’Union européenne et la possibilité pour leur titulaire de s’opposer à l’enregistrement d’une marque ultérieure qui tenterait de tirer profit du caractère distinctif fort de tout ou partie de leurs marques, et ce, même s’il ne s’agit « que » d’un élément visuel.

Le Tribunal de l’Union européenne a rendu le 16 octobre 2018 un arrêt dans une affaire opposant la société VF International titulaire des marques et à M. Ken V. déposant de la marque de l’Union européenne

En 2014, la division d’opposition de l’EUIPO a rejeté l’opposition dans son intégralité, décision confirmée en 2017 par la chambre de recours, considérant que le demande de et les marques antérieures et ne présentaient aucune similitude sur les plans visuel, phonétique et conceptuel.

Toutefois, le Tribunal de l’Union européenne annule la décision de la chambre des recours retenant le fait que les représentations d’un singe participent de manière non négligeable à l’impression produite par les marques en raison de leur caractère aussi distinctif et dominant que les éléments dénominatifs.

Tout en relevant les différences existant entre les marques d’un point de vue phonétique et visuel, il considère que et présentent également d’importantes similitudes : 

  • un élément verbal de longueur comparable,

  • une structure semblable (élément verbal et élément figuratif représentant la silhouette d’un singe),

  • une même proportion des marques et de leurs différents éléments,

  • des éléments figuratifs représentant des singes, à la silhouette élancée, pourvus d’une longue queue et en position de marche,

  • qui plus est représentés de profil, à 4 pattes, sous forme de silhouette noire, avec une queue particulièrement longue par rapport à leur taille et avec une corpulence semblable.

Ainsi, pour le public pertinent qui se fie uniquement à une image imparfaite des signes qu’il garde en mémoire, les différences entre les singes ne sont pas de nature à contrebalancer les similitudes qui existent entre eux et partant les similitudes qui existent entre les marques indépendamment des différences entre les éléments verbaux.

Le Tribunal ajoute d’ailleurs, que d’un point de vue conceptuel, ANOKHI et KIPLING n’évoquant rien, les 2 marques se réfèrent à un singe et concordent donc aussi dans leur contenu sémantique.

Un raisonnement équivalent est tenu pour l’analyse des marques et , le Tribunal insistant d’ailleurs sur le fait que même si les représentations des singes devaient être considérées comme simples, courantes et dénuées de valeur artistiques, cela ne serait pas de nature à remettre en cause ses conclusions.

Il est intéressant de noter que le Tribunal annule les décisions antérieures rejetant l’opposition déposée alors même que la société opposante n’a pas réussi à établir la renommée de ses marques antérieures.

Ce jugement confirme donc l’intérêt de la marque de l’Union européenne et la possibilité pour leur titulaire de s’opposer à l’enregistrement d’une marque ultérieure qui tenterait de tirer profit du caractère distinctif fort de tout ou partie de leurs marques, et ce, même s’il ne s’agit « que » d’un élément visuel.

En conséquence, soyez créatifs dans le choix de vos logos par rapport à votre activité et ne négligez pas leur protection, seuls ou avec des éléments dénominatifs. Une telle stratégie ne pourra qu’augmenter la valeur de vos actifs et de votre patrimoine PI.

Toutefois, soyez prévoyant avant d’adopter des logos et sécurisez vos droits à tout le moins par des recherches et des dépôts, et ce en complément de la vérification des contrats que vous auriez pu signer avec des créateurs et des agences de communication concernant la cession des droits sur ce logo.

Publié par

Martine Bloch-Weill

Associée gérante