Acquisition d’un Certificat d’Obtention Végétale (COV) en France : mode d’emploi

Le certificat d’obtention végétale (COV) est un système unique en son genre parmi tous les droits de Propriété Intellectuelle (PI). Il est le seul droit de PI dont l’objet de la protection – une variété végétale – est testé réellement, en grandeur nature, avant d’être accordé par un Office.

Le certificat d’obtention végétale (COV) est un système unique en son genre parmi tous les droits de Propriété Intellectuelle (PI). Il est le seul droit de PI dont l’objet de la protection – une variété végétale – est testé réellement, en grandeur nature, avant d’être accordé par un Office.

Contrairement aux autres droits de PI, une demande de protection par COV requiert donc la fourniture d’un matériel vivant, prêt à être mis en culture. Ce matériel sera planté dans les conditions spécifiées par le déposant, puis la croissance de la plante sera observée pour vérifier que les critères d’éligibilité pour l’attribution du titre de COV sont bien respectés. 

La procédure d’examen d’un COV peut donc être très longue, notamment pour certaines variétés d’arbres. Contrairement aux brevets d’invention, la durée de protection se calcule d’ailleurs à partir de la délivrance du COV, et non de son dépôt. 

Dans cet article, nous décrivons la marche à suivre pour obtenir un COV protégeant une variété végétale sur le territoire français.

1) A qui s’adresser et quelles sont les lois applicables ?

Les demandes de COV françaises doivent aujourd’hui être déposées auprès de l’Instance Nationale des Obtentions Végétales (INOV). Cette nouvelle instance, localisée à Beaucouzé (49), a été créée en 2014 (Décret 2014-731). Elle remplace le Comité de la Protection des Obtentions Végétales (CPOV), opérant depuis 1971, qui était localisé à Paris et présidé par un Magistrat de la Cour d’Appel de Paris ou du Tribunal de Grande Instance de Paris (Décret n°71-454 du 7 juin 1971). L’équipe en charge de la réception et du traitement des demandes au sein de l’INOV a été restreinte à deux personnes (un responsable et une secrétaire), eu égard au faible nombre de demandes reçues chaque année depuis la création de l’Office Communautaire des Variétés Végétales en 1995.

Jusqu’en 2011, le régime de protection des obtentions végétales était dicté par la Loi n° 70-489 du 11 juin 1970. Il y a dix ans, une nouvelle loi a été promulguée pour transposer la Convention UPOV de 1991 et renforcer le système du COV face au brevet, légaliser la pratique des semences de ferme et proposer un mode de rémunération des obtenteurs (Loi 2011-1843 du 8 décembre 2011). Cette loi a modifié et complété les articles L623-1 à L623-25 et articles R623-1 à R623-58 du Code de la Propriété Intellectuelle (CPI) régissant la protection des obtentions végétales en France.

Bon à savoir : Les formulaires de dépôt des demandes de COV sont disponibles sur le site du GEVES. Il convient de les remplir et de les adresser à l’INOV soit en main propre (au secrétariat de l’INOV), soit par voie postale, soit encore par voie électronique, soit enfin par voie semi-électronique sur la plateforme de l’UPOV.

2) Qui peut / doit déposer la demande de COV ? 

Un COV français peut être demandé à l’INOV par toute personne ressortissante d’un Etat partie à la Convention Internationale pour la protection des obtentions végétales ainsi que par toute personne ressortissante d’un Etat membre de l’Union Européenne ou ayant son domicile, siège ou établissement dans l’un de ces Etats (L623-6CPI).

Une personne domiciliée dans un autre Etat peut également bénéficier de la protection par COV en France si cet autre Etat autorise les Français à bénéficier de la protection par COV sur son territoire (L623-6CPI, dernier alinéa). Les personnes physiques ou morales de cette catégorie doivent, dans un délai de deux mois à compter de la réception de la notification qui leur est adressée à cet effet, constituer un mandataire ayant son domicile, siège ou établissement dans un Etat membre de l’Union Européenne (R623-3 CPI).

3) Quels sont les critères de délivrance par l’INOV ?

Le végétal candidat à la protection par COV doit remplir un certain nombre de critères :

i) tout d’abord, il doit être une « variété », c’est-à-dire qu’il constitue un ensemble végétal d’un taxon botanique du rang le plus bas connu, défini par l’expression des caractères résultant d’un certain génotype (ou d’une certaine combinaison de génotypes), qui puisse être distingué de tout autre ensemble végétal par l’expression d’au moins un desdits caractères; et qui puisse être considéré comme une entité eu égard à son aptitude à être reproduit conforme (L623-1CPI).

ii) Ensuite, la variété doit répondre au critère d’« obtention » , c’est-à-dire qu’elle doit être le fruit d’un travail de recherche, de croisements, ou de stabilisation, et pas simplement le fruit d’une découverte (d’un végétal existant dans la nature).

iii) De plus, à la date de dépôt de la demande de COV, la variété candidate (matériel de reproduction, de multiplication ou produit de récole) ne doit pas avoir été vendue ou remise à un tiers à des fins d’exploitation depuis plus d’un an sur le territoire français ou sur le territoire de l’Espace Economique Européen, ou depuis plus de quatre ou six ans (en fonction des espèces) sur un autre territoire. Il s’agit du critère de « nouveauté », défini dans l’article L623-5CPI alinéa I. L’obtenteur doit donc veiller à déposer sa demande de COV dans le délai prescrit, calculé à partir de la date de la première mise en vente / transmission à un tiers, par lui-même ou avec son consentement.

Bon à savoir : L’obtenteur est autorisé à fournir sa variété à un organisme officiel ou officiellement habilité même au-delà de ces délais, sans préjudice pour sa demande de COV. Une exception est aussi prévue pour qu’il puisse transmettre la variété à un tiers, hors de ces délais, à des fins d’expérimentation ou de présentation dans une exposition officiellement reconnue, mais uniquement, dans ces deux cas, s’il a expressément stipulé l’interdiction d’exploiter commercialement la variété dont le matériel a été remis (L623-5CPI alinéa II).

iv) En outre, la variété doit être reconnue en tant que « nouvelle obtention végétale » par rapport aux variétés des tiers qui constituent l’état de l’art, c’est-à-dire qu’elle se distingue nettement de toute autre variété dont l’existence, à la date du dépôt de la demande, est notoirement connue. Il s’agit là du critère de « distinction » défini dans l’article L623-2CPI al.1. Pour évaluer ce critère, les caractéristiques phénotypiques de la variété candidate sont comparées à celles de toutes les variétés recensées dans la même espèce. Une dizaine de caractères différents sont étudiés (forme et taille des feuilles, taille des plants, couleur, forme et taille des fleurs, etc.).

v) La variété candidate doit également être « homogène » (L623-2CPI al.2), c’est-à-dire qu’elle doit être suffisamment uniforme dans ses caractères pertinents (sous réserve de la variation prévisible compte tenu des particularités de sa reproduction sexuée ou de sa multiplication végétative). Pour évaluer ce critère, plusieurs (>5) échantillons de la variété candidate sont plantés en même temps et leurs caractéristiques phénotypiques sont comparées. Si les plants ne réagissent pas identiquement, alors la demande de COV pourra être rejetée.

vi) La variété candidate doit aussi demeurer « stable », c’est-à-dire qu’elle doit rester identique à sa définition initiale à la suite de ses reproductions ou multiplications successives ou, en cas de cycle particulier de reproduction ou de multiplication, à la fin de chaque cycle (L623-2CPI al.3).

Pour évaluer les trois critères iv) – vi), la variété candidate est soumise à un examen technique appelé « DHS » (pour « distinction, homogénéité et stabilité »). Cet examen est effectué par un Office d’Examen (OE) choisi par et placé sous la responsabilité de l’INOV. Cet OE est généralement le Groupe d’Étude et de contrôle des Variétés Et des Semences (GEVES), situé à Angers (sauf si celui-ci ne possède pas les compétences techniques appropriées pour l’examen de la variété ; dans ce cas, l’INOV confiera l’examen de la variété candidate à un autre Office, choisi au sein de l’Union Européenne). En pratique, le demandeur est informé par l’INOV de l’OE attribué à sa variété et est prié de lui transmettre un échantillon du matériel végétal pour que l’examen DHS soit initié en plein champ / serre.

vii) Enfin, pour qu’un certificat soit délivré, la variété végétale candidate doit posséder un nom approuvé par l’INOV. Proposée par le demandeur dans le formulaire de dépôt, la « dénomination variétale » est rigoureusement examinée pour vérifier sa disponibilité et son éligibilité selon la réglementation en vigueur : cette dénomination doit en effet permettre « d’identifier la variété par rapport à toute autre variété et d’éviter tout risque de confusion avec toute autre variété de la même espèce botanique ou d’une espèce voisine, en France ou dans les Etats parties à la convention internationale pour la protection des obtentions végétales. Elle ne doit pas être susceptible d’induire en erreur ou de prêter à confusion en ce qui concerne l’origine, la provenance, les caractéristiques ou la valeur de la variété ou la personne de l’obtenteur. Elle ne doit pas être contraire aux bonnes mœurs ou à l’ordre public » (R623-6 CPI).

L’examen des dénominations est réalisé par la Commission Dénomination composée de l’INOV et du Secrétariat du Comité Technique Permanent de la Sélection des Plantes Cultivées. Il consiste essentiellement à vérifier la disponibilité du nom proposé par le demandeur dans les bases de données recensant toutes les variétés autorisées dans le monde (CPVO Variety Finder, PLUTO, brevets de plantes, etc.), et les critères d’éligibilité mentionnés dans l’article R623-6CPI. Si l’un des critères n’est pas rempli, l’INOV notifie le refus de cette proposition au demandeur, qui peut alors proposer une nouvelle dénomination de son choix. 

Bon à savoir : le critère de « disponibilité » n’impose pas d’utiliser un nom « original », qui n’aurait jamais été utilisé auparavant pour qualifier une variété autorisée. Ainsi, il est en théorie possible de réutiliser le nom d’une variété qui aurait été exploitée dans un lointain passé, puis supprimée des registres à la demande du déposant. Seul importe alors le fait qu’aucune confusion ni équivoque ne puisse être faite entre la variété candidate et la variété antérieure. Nous vous conseillons d’effectuer vous-même cette recherche de disponibilité au préalable de la soumission du formulaire de dépôt, afin d’éviter des allers-retours avec l’INOV. Vous pouvez également solliciter l’INOV afin que soit effectuée une recherche de disponibilité d’une série de propositions de noms en phase amont de votre dépôt. Ces tests de dénomination, payants, sont à demander au secrétariat du GEVES.

Il est possible de ne pas proposer de dénomination variétale au moment du dépôt de la demande de COV. Cette information devra cependant être fournie à l’INOV dans les deux mois à compter de la notification qu’il adressera et en payant la redevance exigée. Le COV ne sera pas accordé tant qu’une dénomination acceptable n’aura pas été proposée par le demandeur.

Il est également possible de changer d’avis et de proposer en cours d’examen une autre dénomination variétale qui, si elle est approuvée par l’INOV, remplacera celle initialement soumise.

La dénomination variétale, une fois approuvée par l’INOV et publiée sur le Bulletin Officiel de l’INOV, sera associée à la variété ad vitam aeternam, même après l’expiration du titre.

4)  Est-ce qu’un dépôt de COV coûte cher ?

Le coût d’un dépôt de COV en France est plus élevé que celui d’une demande de brevet français, du fait du montant significatif de la redevance due pour l’examen « grandeur nature » qui s’échelonne entre 900 euros et 1300 euros en fonction des espèces (pour voir le détail des montants espèce par espèce, cf. Arrêté du 22 mai 2018). 

Les taxes de dépôt et de délivrance sont en revanche peu élevées (respectivement 100 et 40 euros).

Les taxes de dépôt et d’examen sont à payer lors du dépôt auprès de l’INOV, tandis que la taxe de délivrance doit être payée à la fin de l’examen.

Les redevances annuelles pour le maintien en vigueur des certificats à compter de leur délivrance sont comprises entre 40 et 150 euros (leur valeur croît sur les premières années, jusqu’à atteindre le plafond de 150 euros à partir de la 7ème année).

5) Où et quand sera publiée la demande de COV ?

Le COV est opposable aux tiers dès la date de publication de la demande correspondante (L613-25CPI). Cette publication a lieu sur le bulletin Officiel de l’INOV (qui paraît mensuellement) aussitôt que possible après le dépôt de la demande de COV (R623-39CPI).

Les informations mises à disposition du public sont réparties dans les sections suivantes (R623-39CPI) :

  • Pour chaque demande de protection : l’espèce de la variété, code UPOV, n° de dossier, date de la demande, dénomination proposée, demandeur, adresse du demandeur, obtenteur, adresse de l’obtenteur, description succincte ;
  • Les dénominations variétales : dénominations proposées par le demandeur dans le cadre d’une demande de protection, dénominations acceptées (dans le cadre de la protection/l’inscription), modifications apportées aux dénominations proposées ;
  • Les décisions de délivrance des titres de protection et décisions de refus d’octroi de la délivrance ;
  • Modifications du demandeur ou du titulaire du COV ;
  • Fin de la protection : abandon de la part du titulaire et déchéance de droit notifié par l’INOV, retrait des demandes ;
  • Licence exclusive : informations diverses sur les licences portant sur des demandes et titres.

Une fois la demande de COV publiée, tout tiers y ayant un intérêt peut présenter à l’INOV des observations susceptibles d’empêcher la délivrance d’un COV. Le délai pour ce faire est de deux mois à compter de la publication (R623-17CPI). Les observations sont notifiées au demandeur, qui doit y répondre dans le délai imposé par l’INOV (R623-20CPI).

Bon à savoir : Il n’est pas possible de trouver en ligne les documents échangés par le demandeur et l’INOV (contrairement au registre de l’INPI pour les brevets). Cependant, il est possible de demander à l’INOV de prendre connaissance des pièces du dossier relatives au dépôt, à la procédure d’examen et d’en obtenir reproduction à ses frais et, d’une manière générale, recevoir toutes informations sur l’obtention dont il s’agit, en s’adressant directement à l’INOV (R623-29CPI).

6) Quelle est la durée de l’examen de la demande de COV ? Combien dure la protection conférée par un COV ?

La durée de l’examen a son importance puisque, contrairement aux brevets, la durée de protection d’un COV se calcule à partir de sa date de délivrance et non de sa date de dépôt (L623-13CPI).

Or, la durée de l’examen dépend en partie de la date à laquelle la demande COV est déposée, notamment par rapport à la saison de végétation pour la variété considérée : l’examen d’une variété déposée après le démarrage d’un cycle végétatif sera reporté au cycle suivant et l’examen en sera donc fortement rallongé. Pour connaître les dates limites de dépôt pour chaque espèce de végétal, il convient de contacter l’INOV.

Lorsque la variété candidate a passé avec succès toutes les phases d’instructions administrative et technique, le déposant reçoit une « Notification de délivrance ». A l’inverse, si l’un des critères n’est pas rempli, le déposant reçoit une « Notification de refus d’octroi ».

Bon à savoir : La durée de la protection conférée est, pour la plupart des végétaux, de vingt-cinq ans à partir de la date de délivrance du COV. Certains végétaux bénéficient une durée de protection plus longue : 30 ans pour les arbres forestiers, fruitiers ou d’ornement, pour la vigne, ainsi que pour les graminées et légumineuses fourragères pérennes, les pommes de terre et les lignées endogames utilisées pour la production de variétés hybrides (L623-13CPI).

7) Quelles sont les obligations liées à la délivrance d’un COV ?

En vertu de l’article L623-15CPI, le titulaire d’un COV est tenu de conserver pendant toute la durée de vie du COV un échantillon végétatif de l’obtention végétale protégée.

De plus, il est obligé d’expliciter la dénomination acceptée par l’INOV dans toute transaction commerciale, et ce, même après l’expiration du certificat. Cette dénomination variétale ne peut faire l’objet d’un dépôt de marque. Un tel dépôt peut toutefois avoir été effectué à titre conservatoire, sans faire obstacle à la délivrance du COV, à condition que le titulaire se soit engagé à renoncer définitivement au bénéfice de la jouissance de cette marque en France et dans les Etats parties à la convention UPOV, et ce, préalablement à la délivrance dudit COV (R623-6CPI).

Enfin, des redevances annuelles doivent être versées annuellement à l’INOV (voir point 4).


Depuis la mise en œuvre de la législation communautaire permettant d’obtenir un COV européen de manière centralisée, l’INOV a vu ses demandes diminuer d’année en année pour tomber et se stabiliser à une moyenne de 100-150 dépôts/an. De nombreux déposants ont délaissé le dépôt France pour des dépôts communautaires, d’autant plus qu’un COV national n’est plus opposable si l’obtention végétale est également couverte par un COV communautaire (principe de non-cumul, Art.92 du Règlement européen 2100/94/CE). 

Néanmoins, l’intérêt d’un COV français n’est pas négligeable : il confère à son titulaire, à moindres frais, un droit exclusif de produire, reproduire, conditionner aux fins de la reproduction ou de la multiplication, offrir à la vente, vendre ou commercialiser sous toute autre forme, exporter, importer ou détenir à l’une de ces fins du matériel de reproduction ou de multiplication de la variété protégée sur le territoire français (y compris en Nouvelle Calédonie et dans les îles Wallis et Futuna).

Publié par

Gabrielle Faure-André, Ph.D

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Gabrielle Faure-André, Ph.D

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