Acquisition d’un Certificat d’Obtention Végétale (COV) communautaire : mode d’emploi

La protection des obtentions végétales est un droit de propriété intellectuelle (PI) conçu spécifiquement pour les variétés végétales, lesquelles sont exclues de la protection par brevet. Dans cet article, nous décrivons la marche à suivre pour obtenir un COV sur le territoire communautaire.

La protection des obtentions végétales est un droit de propriété intellectuelle (PI) conçu spécifiquement pour les variétés végétales, lesquelles sont exclues de la protection par brevet.

Les obtenteurs ont la possibilité de demander un titre national de protection des variétés végétales dans la plupart des États membres de l’Union européenne (UE). C’est le cas notamment en France (pour plus de détails à ce sujet, voir notre article intitulé « Acquisition d’un Certificat d’Obtention Végétale (COV) en France : mode d’emploi »).

Cette protection est toutefois limitée au territoire de l’état l’ayant octroyée, de sorte qu’ une demande doit être déposée auprès de l’autorité compétente dans chacun des États où une protection est souhaitée.

Depuis 1995, les obtenteurs de nouvelles variétés végétales peuvent demander l’octroi d’une protection dans toute l’UE par une demande unique adressée à l’Office Communautaire des Variétés Végétales (OCVV). Dans cet article, nous décrivons la marche à suivre pour obtenir un COV sur le territoire communautaire.

1. A qui s’adresser et quelles sont les lois applicables ?

Les demandes de COV communautaires doivent être déposées auprès de l’Office Communautaire des Variétés Végétales (OCVV en français, CPVO en anglais) depuis sa création en 1995, dans le cadre de l’Union Internationale pour la Protection des Variétés Végétales (UPOV). L’OCVV est l’organe de l’UE exclusivement responsable de la mise en œuvre du régime de protection des COV. Le siège de l’OCVV est situé à Angers, en France.

Le régime de protection des variétés végétales communautaires est dicté par le Règlement CE n°2100/94 (ci-après le « Règlement »). Ce Règlement a permis de transposer la Convention internationale pour la protection des obtentions végétales (Convention UPOV) adoptée en 1961, en particulier l’Acte portant révision de la Convention UPOV de 1991. Cette Convention a permis la création de l’UPOV.

Bon à savoir : Les formulaires de dépôt des demandes de COV communautaires sont disponibles sur le site de l’OCVV. Ils peuvent être remplis directement en ligne, après création d’un compte « MyPVR ». Les formulaires peuvent alternativement être déposés ou envoyés sous forme papier à l’OCVV ou à l’une des agences nationales des États membres répertoriées dans le Bulletin Officiel de l’OCVV (Partie B).
Le demandeur peut utiliser l’une des langues officielles d’un État membre de l’UE (Article 34 du Règlement).
Ensuite, une procédure unique permet l’obtention d’un titre valable sur tous les territoires de l’UE.


2. Qui peut / doit déposer la demande de COV ? 

Le droit à la protection communautaire des obtentions végétales appartient à la personne qui a créé ou qui a découvert et développé la variété (l’obtenteur), ou son ayant droit ou ayant cause (Article 11 du Règlement). Le non-respect de cette condition peut entrainer le rejet de la demande de COV (Article 60 du Règlement).

Bon à savoir : La condition selon laquelle le demandeur du COV devait être ressortissant d’un des États membres de l’UE ou d’un membre de l’UPOV a été abrogée par le Règlement CE no 15/2008 du Conseil du 20 décembre 2007. Par conséquent, aux termes de l’Article 12 de ce Règlement, un certificat d’obtention végétale communautaire peut être accordé à toute personne physique ou morale, quels que soit sa nationalité ou son domicile. Toutefois, les personnes qui n’ont ni domicile ni siège ou établissement sur le territoire de l’UE ne sont habilitées à intervenir en tant que partie à une procédure devant l’OCVV que si elles ont désigné un mandataire domicilié ou ayant son siège ou un établissement sur le territoire de l’UE (Article 82 du Règlement).


3. Quels sont les critères de délivrance d’un COV par l’OCVV ?

3.1. Le végétal à protéger doit être une « variété » au sens de l’Article 5 du Règlement. Ainsi, le végétal doit appartenir à un seul taxon botanique du rang le plus bas connu, pouvant :

« – être défini par l’expression des caractères résultant d’un certain génotype ou d’une certaine combinaison de génotypes,

– être distingué de tout autre ensemble végétal par l’expression d’au moins un desdits caractères

et

– être considéré comme une entité eu égard à son aptitude à être reproduit sans changement. »

3.2. La variété doit alors remplir les conditions de distinction, d’homogénéité, de stabilité et de nouveauté (Article 6 du Règlement) :

3.2.1. Distinction

« Une variété est considérée comme distincte si elle se distingue nettement, par référence à l’expression des caractères qui résultent d’un génotype ou d’une combinaison de génotypes donnés, de toute autre variété dont l’existence est notoirement connue à la date de dépôt de la demande […] » (Article 7.1 du Règlement).

3.2.2. Homogénéité

« Une variété est considérée comme homogène si, sous réserve des variations susceptibles de résulter des particularités de sa multiplication, elle est suffisamment homogène dans l’expression des caractères compris dans l’examen de la distinction et de tout autre caractère utilisé pour la description de la variété. » (Article 8 du Règlement).

3.2.3. Stabilité

« Une variété est considérée comme stable si l’expression des caractères compris dans l’examen de la distinction et de tout autre caractère utilisé pour la description de la variété reste inchangée à la suite de multiplications successives ou, en cas de cycle particulier de multiplication, à la fin de chaque cycle. » (Article 9 du Règlement).

3.2.4. Nouveauté

« Une variété est considérée comme nouvelle si, à la date du dépôt de la demande […], les constituants variétaux ou un matériel de récolte de la variété n’ont pas été vendus ou cédés d’une autre manière à des tiers par l’obtenteur ou avec son consentement […] aux fins de l’exploitation de la variété :

  1. sur le territoire de la Communauté, depuis plus d’un an à compter de la date susmentionnée;
  2. en dehors du territoire de la Communauté, depuis plus de quatre ans ou, dans le cas des arbres ou des vignes, depuis plus de six ans à compter de la date en question. » (Article 10.1 du Règlement).

Les conditions de distinction, homogénéité et stabilité (DHS) font l’objet d’un examen technique effectué sous la responsabilité de l’OCVV. En pratique, l’OCVV confie cet examen technique à un office d’examen (OE) habilité pour tester des espèces allouées (Article 55 du Règlement).

Concrètement, le demandeur envoie le matériel végétal à l’OE attribué à sa variété, sur notification de l’OCVV. Après réception, l’OE :

  • identifie les variétés les plus proches dans ses collections,
  • sème/plante le matériel végétal en plein champ/serre, et
  • vérifie l’homogénéité et la stabilité du végétal, ainsi que sa distinction en la comparant aux variétés les plus proches.

Une fois l’examen technique finalisé, l’OE établit un rapport d’examen. Le demandeur a la possibilité de commenter ce rapport et la description variétale dans un délai de deux mois. Passé ce délai et si aucun obstacle n’a été découvert en ce qui concerne la dénomination variétale proposée par l’obtenteur (voir ci-dessous), l’OCVV statue sur la demande de COV communautaire. La décision est prise sous l’autorité du président de l’Office par un comité composé de quatre membres, dont deux possèdent des qualifications techniques, un des qualifications juridiques et un membre est en charge de l’approbation de la proposition de la dénomination variétale (voir ci-dessous).

3.3. Enfin, le nom de la variété proposé par l’obtenteur doit être approuvé en tant que dénomination variétale par l’OCVV (Article 6 du Règlement). A cette fin, l’OCVV vérifie que le nom proposé satisfait les conditions définies par l’Article 63 du Règlement. En l’espèce, la dénomination doit être libre de droit antérieur (disponible) et facile à reconnaître ou à reproduire par ses utilisateurs. En outre, la dénomination ne doit pas être identique à, ou ne doit pas pouvoir être confondue avec, d’autres dénominations. Elle ne doit pas être susceptible d’induire en erreur ou de prêter à confusion quant aux caractères, à la valeur ou à l’identité de la variété ou à l’identité de l’obtenteur. Elle ne doit, de surcroît, pas contrevenir aux bonnes mœurs dans un des États membres ni être contraire à l’ordre public.

La procédure d’approbation d’une dénomination variétale se déroule en plusieurs étapes. Quand l’OCVV reçoit une proposition de dénomination variétale, celle-ci est contrôlée. S’il y a un obstacle s’opposant à cette dénomination, le demandeur en est informé et a la possibilité de soumettre des commentaires ou une nouvelle proposition de dénomination variétale. Dans le cas où il n’y a pas d’obstacle, elle est publiée dans le Bulletin officiel. L’approbation a lieu au moment même de la décision d’octroi d’un titre de protection. Une fois que la dénomination est approuvée et que la variété est protégée, cette dénomination variétale doit obligatoirement être utilisée à toute fin commerciale, même si une marque y est associée.

4. Est-ce que le dépôt d’un COV communautaire coûte cher ?

Le dépôt d’une demande de COV implique le paiement d’une taxe de dépôt s’élevant à 450€ pour une demande en ligne ou à 800€ pour une demande papier (montants en vigueur en novembre 2022).

Les montants des taxes d’examen sont déterminés par le règlement sur les taxes en vigueur. Le montant exigible pour chaque période de culture varie de 1900€ à 3900€, en fonction de l’espèce à laquelle la variété appartient. Le coût de l’examen peut donc être très élevé pour des variétés nécessitant une mise en culture sur plusieurs années.

Une taxe annuelle est également exigible à partir de l’octroi du COV. Le montant forfaitaire est fixé à 330€ par variété et par année de protection.

Récapitulatif des Taxes à payer à l’OCVV

Taxe de dépôtDépôt en ligne : 450€ Dépôt papier :  800€
Taxe d’examenEntre 1900 et 3900€ par période de culture (dépend de l’espèce végétale)
Taxe annuelle de maintien330€ par an


5. Où et quand sera publiée la demande de COV ?

L’OCVV tient un registre des demandes de protection communautaire des obtentions végétales (Article 87 du Règlement).

Tous les deux mois (mois pairs), l’OCVV publie, sur son site Internet, un Bulletin officiel qui indique les changements apportés au registre de l’Office sur la période de deux mois écoulés depuis la publication précédente, notamment les COV délivrés (Article 89 du Règlement).

Les informations mises à disposition du public sont définies par l’Article 87 du Règlement : 

  • Pour chaque demande de protection : mention du taxon, de la dénomination provisoire de la variété, de la date de dépôt, ainsi que des nom et adresse du demandeur, de l’obtenteur et de tout mandataire concerné ;
  • Les dénominations variétales proposées par le demandeur dans le cadre d’une demande de protection ;
  • Pour chaque COV octroyé :
    • l’espèce et la dénomination de la variété ;
    • la description officielle de la variété ou la mention des documents que possède l’Office et qui contiennent cette description officielle en tant que partie intégrante du registre ;
    • dans le cas de variétés nécessitant, pour la production de matériel, l’emploi répété de matériel de certains composants, la mention de ces composants ;
    • les nom et adresse du titulaire, de l’obtenteur et de tout mandataire constitué ;
    • la date de début et d’extinction de la protection communautaire, ainsi que le motif de son extinction ;
    • les licences exclusives ou obligatoires (sur demande uniquement) ;
  • Les modifications du demandeur ou du titulaire du COV ;
  • La fin de la protection : abandon de la part du titulaire, déchéance de droit, retrait des demandes, etc.

Les pièces relatives à une demande de COV ou à un COV délivré, ou encore aux essais en culture destinés à l’examen technique d’une variété ou à la vérification technique du maintien d’une variété, sont accessibles uniquement sur demande, en cas d’intérêt légitime (Article 88 du Règlement).

Une fois la demande de COV publiée, toute personne peut adresser à l’OCVV une objection écrite à l’octroi de la protection. Les auteurs des objections acquièrent, à côté du demandeur, la qualité de parties à la procédure. Ils peuvent alors avoir accès aux pièces de la procédure, y compris les résultats de l’examen technique et la description de la variété (Article 59 du Règlement).

Les objections ne peuvent invoquer que les motifs suivants :

  1. les conditions de distinction, d’homogénéité, de stabilité, de nouveauté, énoncées aux articles 7 à 10 du Règlement ne sont pas remplies ;
  2. le demandeur n’est pas le titulaire du droit à la protection, c’est-à-dire la personne qui a créé ou qui a découvert et développé la variété, ou son ayant droit ou ayant cause (Article 11 du Règlement, voir la section 2 ci-dessus) ;
  3. la dénomination proposée par le demandeur ne remplit pas les conditions définies par l’article 63 du Règlement (voir le paragraphe 3.3 ci-dessus).

Le délai pour présenter les objections dépend des motifs qui seront invoqués. Ces objections peuvent ainsi être fournies à l’OCVV :

  1. à tout moment après que la demande a été déposée et avant que n’intervienne une décision de rejet ou d’octroi de la demande de COV, pour les motifs a) et b) ; ou
  2. dans un délai de trois mois à compter de la publication de la dénomination variétale proposée, si le motif c) est invoqué.

Les décisions relatives aux objections peuvent être prises en même temps que les décisions de rejet ou d’octroi de la demande de COV ou au moment de l’approbation de la dénomination variétale proposée.

Bon à savoir : Le COV est opposable aux tiers dès la date de publication de la demande. En effet, le titulaire du COV est en droit d’exiger une indemnisation équitable de la part d’un tiers ayant accompli un acte interdit entre la publication de la demande de COV et l’octroi du titre (protection provisoire ; Article 95 du Règlement). Cependant, aucune interdiction d’exploiter ne peut être prononcée avant la délivrance du COV.


6. Quelle est la durée de l’examen de la demande de COV ? Combien dure la protection conférée par un COV ?

La durée de l’examen a son importance puisque, contrairement aux brevets, la durée de protection d’un COV prend en compte la date d’octroi.

La durée de l’examen dépend en partie de la date à laquelle la demande de COV est déposée, par rapport à la saison de culture pour la variété considérée : l’examen d’une variété déposée après le démarrage d’un cycle végétatif sera reporté au cycle suivant de sorte qu’il en sera donc fortement rallongé. Les dates de clôture et de soumission du matériel végétal sont publiées sur la page ‘Plant material submission to entrusted Examination Offices – S2/S3 Publication’, disponible sur le site internet de l’OCVV.

Lorsque la variété candidate a passé avec succès toutes les phases d’instructions administrative et technique, l’OCVV émet une décision d’octroi de la protection (Article 62 du Règlement). A l’inverse, si l’un des critères n’est pas rempli, l’OCVV rejette la demande de protection (Article 61 du Règlement).

Bon à savoir : La durée de la protection comprend la protection provisoire conférée dès la publication de la demande de COV (voir la section 5 ci-dessus). Cette durée s’étend, pour la plupart des végétaux, jusqu’à vingt-cinq ans suivant l’octroi du COV. Certains végétaux bénéficient d’une durée de protection plus longue (30 ans pour les variétés de vignes et d’arbres notamment ; Article 19 du Règlement). Les durées de protection en fonction des espèces sont également disponibles sur la page ‘Plant material submission to entrusted Examination Offices – S2/S3 Publication’.


7. Quels sont les obligations en cas de délivrance d’un COV ?

L’article 64 du Règlement impose le maintien de la variété protégée en tant que telle, pendant toute la durée de vie du COV. L’Office peut vérifier si les variétés protégées continuent d’exister telles quelles. À cette fin, il est procédé à une vérification technique similaire à l’examen technique DHS (voir la section 3 ci-dessus).

En vertu de l’article 17 du Règlement, le titulaire est tenu d’utiliser la dénomination acceptée par l’OCVV dans toute transaction commerciale, et ce, même après l’expiration de la durée du certificat.

Il conviendra en outre de payer les taxes annuelles pour le maintien de la protection communautaire des obtentions végétales (Article 21 du Règlement).


Si les coûts liés au dépôt et à l’examen de la demande de COV communautaire, ou encore au maintien du titre communautaire, sont plus élevés que ceux liés au COV français, les COV communautaires apportent néanmoins un certain nombre d’avantages.

En premier lieu, la protection conférée par un COV communautaire est valable sur l’ensemble des territoires de l’UE.

L’OCVV offre en outre différentes options additionnelles, telle que la possibilité de former un recours contre la majeure partie des décisions de l’Office (Articles 67 à 72 du Règlement). Il existe également des dispositions de rétablissement (« restitutio in integrum ») d’une demande de COV ou d’un COV communautaire octroyé, lorsqu’un délai n’a pas pu être observé par le demandeur ou titulaire, « malgré toute la diligence dont il a fait preuve dans les circonstances particulières » (Article 80 du Règlement). Par ailleurs, l’Article 77 du Règlement permet le recours à une procédure orale, soit à l’initiative de l’OCVV, soit à la demande de l’une des parties à la procédure. 

Vous avez mis au point une nouvelle variété végétale ? Vous avez des questions à ce sujet ?

Les équipes de REGIMBEAU se tiennent à votre disposition pour vous accompagner dans vos démarches pour la protéger, que ce soit par le biais d’un COV national ou dans toute l’Union Européenne par le biais d’un COV communautaire.  

Publié par

Aurélia Vavasseur, Ph.D

Conseil en Propriété Industrielle
Mandataire en Brevets Européens