Le Sac Longchamp : La Cour de Cassation considère que l’affaire n’est pas encore pliée

La Cour de Cassation vient de rendre le 15 mai 2015 un arrêt cassant fort heureusement un arrêt de la Cour d’Appel de Paris du 13 septembre 2013.

La Cour de Cassation vient de rendre le 15 mai 2015 un arrêt cassant fort heureusement un arrêt de la Cour d’Appel de Paris du 13 septembre 2013.

Les sociétés demanderesses avaient assigné en contrefaçon et en concurrence déloyale et parasitaire la société fabricant et la société commercialisant un sac pliant estimant que le sac litigieux reprenait la combinaison des différentes caractéristiques du sac Longchamp, combinaison manifestant l’empreinte de la personnalité de leur auteur lui conférant un caractère original.

Cette combinaison était clairement définie comme suit :

  • son petit rabat pressionné, situé entre les deux poignées et qui coiffe une partie de la fermeture à glissière ;
  • la forme légèrement arrondie de ce petit rabat, soulignée par une épaisse couture surpiquée ;
  • la couture surpiquée sur le devant du sac, dans le prolongement du rabat et qui évoque
  • le contour de sa poche interne ;
  • la fixation de ce rabat au dos du sac par une double couture surpiquée ;
  • ses deux poignées terminées en pointes arrondies fixées, à l’aide de pattes surpiquées, de chaque côté de l’ouverture du sac ;
  • ses deux petites languettes arrondies, situées à chaque extrémité de la fermeture à glissière et qui soulignent les coins supérieurs du sac, en rebiquant ;
  • la forme trapézoïdale de son corps, vue de face ;
  • son fond rectangulaire ;
  • son profil triangulaire ;

Mais la Cour d’Appel pour fonder sa décision et rejeter la contrefaçon a indiqué que le sac litigieux ne reprenait pas les éléments dominants de la combinaison qui confèrent au sac Longchamp son originalité en invoquant des éléments, tels qu’une épaisse couture surpiquée, un bouton doré, des surpiqures très apparentes, l’alliance du cuir fauve surpiqué et d’autres matériaux et couleurs… alors que ces éléments n’avaient pas été retenus par la Cour pour asseoir l’originalité du sac Longchamp et étaient d’ailleurs différents de ceux énumérés par les sociétés appelantes.

La Cour d’Appel en avait conclu que le sac litigieux présentait donc des différences importantes lui conférant une physionomie propre en sorte que l’impression d’ensemble qui s’en dégage excluait tout risque de confusion.

La Cour de Cassation a cassé cet arrêt car:

  • La Cour d’appel aurait dû se fonder uniquement sur les éléments qui constituent l’originalité du produit pour écarter la contrefaçon,
  • L’existence d’un risque de confusion est indifférente à la caractérisation de la contrefaçon de droit d’auteur.

La Cour de Cassation rappelle ainsi deux points fondamentaux en matière de droit d’auteur et souligne certaines difficultés souvent rencontrées dans cette matière complexe.

Dans le cadre d’un litige il est donc important de définir précisément les éléments ou la combinaison d’éléments constituant l’originalité d’un produit sans être trop général ni trop gourmand en voulant tenter de s’approprier des éléments commun à la catégorie des créations concernées.

Par ailleurs il est important de garder à l’esprit que chaque catégorie de droits de propriété industrielle bénéficie de ses propres règles qui ne peuvent se substituer l’une à l’autre, les conditions de protection d’une part et l’analyse de l’atteinte aux droits d’autre part étant spécifiques.

Ainsi, si l’existence d’un risque de confusion doit être recherchée en cas d’atteinte à une marque par l’usage d’une marque similaire, il n’a aucune incidence en matière de droit d’auteur.

Il convient donc de choisir avec soin les fondements de fait et de droit dans le cadre d’une action amiable ou judiciaire.

Cela implique un travail d’analyse en amont et si possible dès la création du produit sur l’éventail des protections qui peuvent être envisagées afin de les sélectionner et éventuellement de les cumuler pour pouvoir les mettre en œuvre ultérieurement et protéger ses actifs et ses investissements.

Publié par

Martine Bloch-Weill

Associée gérante