En droit français selon les articles L.513-3, L.613-9 et L.714-7 du Code de la Propriété Intellectuelle, « tous les actes affectant la propriété ou la jouissance » d’un titre de propriété industrielle doivent être inscrits auprès des Registres des Brevets, Marques ou Modèles, non pour leur validité intrinsèque, mais pour être opposables aux tiers à compter de la publication de leur inscription. La plupart des Offices n’imposant pas de condition de délai pour ces formalités, le plus souvent, les titulaires omettent de faire inscrire ces changements ou, pour des raisons budgétaires, souhaitent différer cette formalité. Le temps passant les modifications peuvent se succéder, rendant de plus en plus complexe la situation et plus difficile la régularisation de la titularité des titres, notamment si les droits sont protégés dans de nombreux pays, ou si les sociétés n’existent plus. Même si des procédures d’inscription accélérées sont possibles auprès des Offices tant nationaux qu’étrangers, nous recommandons de les réaliser sans attendre.
Deux décisions de jurisprudence illustrent pour la première, les conséquences malheureuses mais hélas fréquentes de cette absence de mise à jour de la titularité des droits, et de régularisation trop tardive, pour la seconde, l’intérêt de cette inscription au RNM pour agir en contrefaçon et obtenir réparation.
Dans l’affaire Sony c/Subsonic[1], ce sont les sociétés SONY en qualité de demanderesses à l’action en contrefaçon et concurrence déloyale qui ont été déclarées irrecevables à agir. En effet, et conformément à l’art. L.716-4-2 du Code de Propriété Intellectuelle, seuls les propriétaires des titres ou leurs licenciés (en matière de marques avec le consentement du titulaire et sauf stipulation contraire du contrat) peuvent exercer l’action en contrefaçon, obtenir sanctions et réparations. Or les demanderesses n’étaient pas parvenues en 1ère instance à établir la réalité d’un transfert de propriété en leur faveur des trois brevets fondements de leur action, transfert survenu près de 8 ans avant la demande d’inscription. La Cour d’Appel ayant admis ensuite la validité de l’inscription au vu de documents complémentaires, elle a toutefois jugé celle-ci trop tardive, sa publication étant intervenue après l’assignation de la société SUBSONIC. En effet et selon une jurisprudence établie, les actes de contrefaçon antérieurs à la publication de l’inscription, ne peuvent pas être poursuivis.
Dans une autre affaire Mousti’stores SARL c. AMB France SAS et C Stores SAS[2] c’est la portée du contrat de licence, et notamment la faculté pour le licencié d’agir seul sans avoir besoin d’une autorisation écrite préalable du titulaire de la marque ou de l’envoi à celui-ci, par le licencié, d’une mise en demeure d’avoir à agir en justice demeurée sans effet qui a été confirmée grâce à l’analyse du contrat de licence inscrit auprès du RNM.
[1] Cour d’appel de Paris, 9 sept. 2022, SONY JP, SONY UK, SONY FR c/SUBSONIC arrêt C. (RG 20/12901)
[2] Cour d’appel de Paris, pôle 5, 2e ch., 22 avr. 2022, 21/19812 (M20220137) Mousti’stores SARL c. AMB France SAS et C Stores SAS
Publié par
Jérôme Braquehais
Responsable du Service Inscriptions